Altitudes - interview

Altitudes

Quelques questions posées à Fredziak à propos d'Altitudes :

  • Comment définirais-tu cet album, ALTITUDES ?
  • ALTITUDES est pour moi un voyage mental dans différents paysages d'humeurs et d'émotions. Cet album est comme une "symphonie synthétique". L'expression paraît pompeuse et ma musique est peu comparable avec les chefs-d'oeuvres classiques, mais je veux dire par là que c'est une longue suite abstraite, évocative et plutôt ambitieuse dans sa forme. L'idée est de proposer une musique électronique qui soit autre chose qu'un tube pour boîtes de nuit ou un jingle de publicité. J'ai souhaité qu'elle ne soit ni dance, ni electro, ni ambient. C'est une musique qui peut paraître assez classique sous certains aspects mais qui en même temps foisonne de subtilités inhabituelles. Elle revendique ainsi une certaine complexité et réclame une écoute approfondie, aux antipodes du "fast listening" auquel, comme le "fast food", nous sommes de plus en plus habitués...
  • Y a-t-il un lien particulier entre les monts mentionnés dans les titres et les morceaux de musique correspondants ?
  • Je rêve d'affirmer que j'ai composé chaque morceau sur ces différents sommets mais ce serait peu crédible ! Non, j'ai simplement trouvé que c'était une bonne façon de leur donner une identité. J'ai une fascination pour les montagnes, fascination partagée avec beaucoup de gens, je suppose.
  • Quel est ton parcours musical ?
  • La production musicale est pour moi une activité récente. Je suis passionné par la musique depuis ma plus tendre enfance mais divers obstacles ont fait que je n'ai jamais suivi d'études musicales traditionnelles. Pendant des années, je me suis exprimé dans d'autres domaines comme la littérature et la peinture tout ça pour constater que je n'étais qu'un musicien frustré ! J'ai pris des leçons de piano pendant un moment, ce qui m'a aidé à maîtriser certaines bases mais m'a en même temps rappelé qu'il était un peu tard pour devenir un musicien digne de ce nom... L'histoire aurait pu s'arrêter là mais il y a cinq ans, j'ai décidé de revenir à la musique par moi-même pour trouver la voie qui serait adaptée à mes possibilités et mes désirs. Je me suis procuré quelques synthétiseurs et j'ai essayé de produire des morceaux. J'avais beaucoup à apprendre mais par bonheur, les résultats ont été suffisamment bons pour m'encourager à continuer...
  • Comment est né le projet ALTITUDES ?
  • Après quelques productions pour la poubelle, j'ai commencé à accumuler des morceaux intéressants et dès ce moment, j'ai eu l'idée de construire une suite complète. En guise d'exercice, j'avais en projet de produire des variations sur un célèbre thème de Paganini. J'ai très vite préféré composer mes propres mélodies bien que Paganini apparaisse encore dans ALTITUDES ! Tout ceci m'a conduit aux 9 morceaux que vous pouvez écouter aujourd'hui. Il m'a fallu près de 5 ans pour produire l'album, ce qui est long dans l'absolu mais court quand on sait d'où je suis parti. Je suis plutôt satisfait du résultat pour une première tentative même si je le referais sans doute différemment aujourd'hui.
  • Quels sont les artistes qui t'ont influencé pour ce travail ?
  • Jean Michel Jarre a été une influence majeure pour ne pas dire une référence. ALTITUDES partage beaucoup de caractéristiques avec sa musique, d'abord en tant que "suite synthétique instrumentale". Mais cette influence est sûrement plus intime, dans le choix des sons, dans la manière de les imbriquer. Dès le départ j'ai eu le travail de Jarre à l'esprit mais j'ai essayé de garder une distance suffisante afin de construire mon propre style, sauf peut-être sur le dernier morceau pour lequel je me suis lâché !
    En plus de cette référence, je suis beaucoup influencé par la musique classique que je vénère et par la scène électronique en général, mais il faut reconnaître que ça apparaît de manière plus subtile. Je me suis aussi penché sur les bandes sons de vieux dessins animés : l'étude des "Merveilleuses Cités d'Or", dont la musique est à mon avis plus merveilleuse que les cités, a inspiré deux passages d'ALTITUDES.
  • Comment te situes-tu par rapport à la scène électro et la scène française en particulier ?
  • Je n'ai pas la volonté de me situer ici ou là par rapport aux autres, surtout que je me sens encore comme un débutant. Je crois que peu d'artistes ont cette démarche, ils font la musique qu'ils ont envie de faire et c'est le public mais surtout les labels et les médias qui leur donnent telle ou telle place.
    Je n'ai pas de raison de me sentir à l'écart de la scène électro qui foisonne d'idées et d'artistes qui m'influencent. En même temps, ma musique ne suit pas forcément les choix à la mode. Si je fais bien partie de la famille, je me sens plutôt comme un cousin éloigné.
  • Quels instruments as-tu utilisés ?
  • Cette musique a en bonne partie été créée avec des synthétiseurs des trente dernières années. J'ai peu utilisé d'instruments logiciels récents, non par dogmatisme mais parce que j'ai eu la sensation que le contact avec du vieux matériel était plus inspirant.
  • Avec une prédilection pour les sons analogiques ?
  • Je me sens en phase avec l'attrait pour le vintage et en particulier les vieux synthétiseurs analogiques. J'ai donc mis à contribution leurs sonorités pour ALTITUDES, mais je n'en ai pas fait une règle absolue et j'ai trouvé plus intéressante encore l'idée de les confronter à celles des machines numériques. Les deux techniques me paraissent complémentaires pour élargir la palette sonore. L'analogique est aujourd'hui tellement à la mode qu'on n'est peut-être pas loin de s'en lasser ; il vaut mieux voir plus large pour aller au delà, et ce même si le son analogique est formidable et le sera durablement.
  • Quelle place alors pour l'ordinateur ?
  • L'ordinateur et les logiciels me sont apparus incontournables pour organiser et finaliser la production. On peut toujours faire autrement mais les facilités offertes sont aujourdhui incomparables. Elles donnent un rôle prépondérant à l'artiste sur toutes les étapes de la création et cela me semble vraiment important pour un projet comme ALTITUDES que j'ai construit d'un bout à l'autre.
  • Pourquoi avoir choisi une distribution libre et gratuite de l'album ?
  • Avant tout, je me suis dit que rendre payant l'accès à ma musique, c'était lui accrocher un boulet qui nuisait à sa diffusion, c'était comme se tirer une balle dans le pied. Et puis quel revenu financier aurais-je pu en attendre ? Si mon objectif avait été de faire fortune, je crois que je me serais trompé d'activité !
    Il s'est passé beaucoup de choses dans l'histoire de l'industrie musicale ces 15 dernières années et on ne peut pas les ignorer. Je pense que copier ma musique ne m'enlève rien tant que ma qualité d'auteur est respectée. La distribuer gratuitement est aussi un manifeste, pour affirmer que "ceci est une création d'une valeur inestimable et non une marchandise". Bien sûr, les artistes ont encore besoin d'argent pour vivre et rester créatifs mais c'est un autre débat. Des milliers d'artistes diffusent leurs créations gratuitement, il serait grand temps de le reconnaître afin que les politiques culturelles soient un soutien à la création et non un soutien au commerce ! En même temps, je ne veux pas passer pour un extrémiste : payer pour de la musique, ça n'est pas sale et ce serait même un geste noble par les temps qui courent...
  • Cette révolution ne pénalise-t-elle pas les artistes ?
  • C'est sûrement vrai pour ceux qui profitaient de l'ancien système mais pas pour ceux qui avaient bien du mal à y accéder. On pourra rétorquer que ce système avait le mérite de faire le tri entre le bon et le mauvais mais dans les faits, les profits ont souvent primé sur le soutien aux véritables talents.
    Nous vivons une époque captivante qui est en quête d'un modèle équilibré. C'est un peu anxiogène pour les artistes mais ça fait surtout peur à ceux qui se faisaient de l'argent sur leur dos. N'en déplaise au discours officiel qui n'est trop souvent qu'un relai des lobbys, le foisonnement de ce qu'on trouve sur Internet montre que la création ne s'est jamais aussi bien portée. D'un point de vue artistique, ça fait du bien de sortir de cette période sclérosée par le marketing.
  • Est-ce que tu prévois des concerts ?
  • Je ne suis pas sûr d'être prêt pour ça ! Je me sens plus comme un compositeur ou un producteur que comme un instrumentiste. Ceci étant, je ne refuserais peut-être pas une occasion de faire retentir ma musique en public, surtout si c'est pour l'accompagner d'éléments visuels intéressants.
  • Cette musique serait-elle plutôt adaptée au cinéma ?
  • Je ne l'ai pas conçue pour mais l'idée d'en faire la bande son d'un film me plaît bien. Tout dépend du film...
  • Quels seront tes prochains projets musicaux ?
  • A court terme, j'aimerais travailler à un ensemble de remixes des morceaux d'ALTITUDES. Il y a beaucoup de genres musicaux et de sonorités que je voudrais explorer et qui n'avaient pas leur place dans l'album initial. Ensuite, j'envisage un deuxième album mais en parler maintenant serait très prématuré, surtout si je mets autant de temps à le produire que le premier !


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